Depuis plusieurs mois, le Nigeria, géant démographique et économique de l’Afrique de l’ouest, traverse une période de flottement diplomatique préoccupante. Alors que le pays fait face à des restrictions sévères sur l'obtention de visas de la part des Etats-Unis d’Amérique et des Emirats arabes unis, les réponses de l’Etat nigérian tardent à se faire entendre. Le président Bola Ahmed Tinubu a bien annoncé le mardi 15 juillet 2025, son intention d’engager des discussions diplomatiques à ce sujet, mais cette volonté se heurte à une réalité gênante : le Nigeria n’a quasiment plus d’ambassadeurs en poste à l’étranger. A l’exception de ses représentations permanentes à New York et à Genève, toutes les missions diplomatiques nigérianes sont actuellement dirigées par des chargés d’affaires, dont le rôle reste limité sur le plan politique.

Cette situation remonte à 2023, peu après l'arrivée au pouvoir de Bola Tinubu. Le président nigérian avait alors décidé de rappeler la centaine de chefs de mission nigérians à travers le monde, sans fournir d’explication officielle. Depuis, aucune nomination n’a été faite pour les remplacer, laissant le Nigeria sans représentation diplomatique de haut niveau à un moment où sa voix devrait pourtant se faire entendre avec force. L’absence d’ambassadeurs complique les négociations bilatérales, freine les discussions stratégiques et empêche le pays d’affirmer sa position dans les forums internationaux. Elle prive le Nigeria d’un relais diplomatique essentiel, entrave également le travail consulaire, affectant les ressortissants nigérians à l’étranger, souvent confrontés à des lenteurs administratives et à un sentiment d’abandon. Les chargés d’affaires, dépourvus du même poids diplomatique que des ambassadeurs, peinent à établir des liens solides avec les autorités des pays hôtes.

Dans un monde où les rapports de force se redessinent à grande vitesse, la diplomatie reste un levier fondamental de puissance et d’influence. Le Nigeria, fort de par sa population de plus de 200 millions d’habitants, de ses ressources naturelles et de son poids culturel, dispose de tous les atouts pour jouer un rôle majeur. Mais encore faut-il qu’il parle d’une voix forte, incarnée, et présente là où se décide l’avenir. Pour cela, il devient urgent de combler les vides diplomatiques et de redonner à la politique étrangère la place qu’elle mérite dans la stratégie nationale. Sans représentants capables de défendre ses intérêts et de nouer des alliances, le pays risque de perdre encore davantage d’influence dans un monde où la présence diplomatique reste un levier stratégique majeur.

Texte : Mina Tiéporogadana DEMBELE

Récit : Massi de GANHOUE