Le monde numérique, censé être un espace d’expression et de liberté, est devenu pour beaucoup de femmes un champ de bataille. Insultes, menaces, fake news, sextapes détournées : le cyberharcèlement envers les femmes africaines est un fléau aussi massif qu’invisible.

Le film Harcèlement 2.0, projeté le samedi 23 août 2025 au Goethe-Institut d’Abidjan, donne la parole à celles qui subissent ces violences numériques. À travers leurs témoignages, la douleur se transforme en force, en résistance et en exigence de justice.

Sa réalisatrice, la sociologue tchadienne Aché Ahmat Moustapha, brise le silence. Victime elle-même de cyberharcèlement, elle signe ici un véritable cri de révolte contre une violence sexiste et systémique. Dans son film, elle dénonce l’impunité, interroge la responsabilité des plateformes et met en lumière les luttes numériques de femmes déterminées à ne pas disparaître du débat public.

À travers ce documentaire, Aché Ahmat Moustapha appelle à l’action : conserver les preuves, faire des captures d’écran, et surtout porter plainte. Elle exhorte également les États africains à contraindre les géants du numérique à mettre en place de véritables mécanismes de protection, capables de défendre les droits de toutes et de tous.

Une alerte qui résonne d’autant plus fort qu’en 2020, une enquête conjointe de l’UNESCO et du Centre international des journalistes révélait que 73 % des femmes journalistes interrogées dans quinze pays africains, dont le Ghana et le Nigeria, avaient été victimes de violences en ligne. Les plateformes Facebook et X (ex-Twitter) y étaient désignées comme les moins sûres pour les femmes journalistes.

 Avec Harcèlement 2.0, Aché Ahmat Moustapha ne se contente pas de filmer la douleur : elle transforme la peur en parole, et la parole en acte. Une œuvre coup de poing qui appelle à reprendre possession du numérique, cet espace où les femmes africaines doivent pouvoir exister, s’exprimer et briller, sans peur.

 Texte et récit : Marie-Paule N’GUESSAN